[Français à l’étranger] :Comment êtes-vous arrivée ici, à Montréal ?
Mélanie Boude : Je suis née à Toronto de parents français, j’ai grandi et fais ma scolarité là-bas. En 2007, nous avons déménagé en famille à Montréal, car mon père prenait sa retraite de VIA Rail. J’ai réellement été élevée en tant que Française à l’étranger. Mon père est arrivé à l’âge de 20 ans, car mon grand-père était expatrié pour une société américaine. Il était justement représentant des Français à l’étranger à l’époque. Ma mère elle est arrivée en 1981 pour faire sa maitrise à l’Université de Montréal puis est rentrée en France pour ensuite revenir immigrer en 1985.
Vous n’avez jamais eu envie d’aller en France ou de travailler en France ?
M.B : Nous rentrions jusqu’à quatre fois par an en France, donc j’ai grandi entre les deux pays. Je passais toujours mes vacances en France, et j’étais à l’école publique à Toronto le reste du temps. Donc non, je ne me suis jamais trop posé la question. En revanche, la France a toujours occupé une place importante dans ma vie. Je suis arrivée chez Business France parce que, justement, je côtoyais beaucoup la communauté française de l’étranger et, à force, cela m’a donné envie de faire quelque chose là-dedans.
Quel a été votre parcours professionnel avant de rejoindre Business France ?
M.B : En 2007, j’ai effectué un stage de six mois pour la « Mission économique » de Toronto. Ensuite, je suis venue à Montréal, mais je n’ai pas vraiment apprécié donc je suis retournée à Toronto. J’ai eu l’opportunité d’aller à Kigali, au Rwanda, pour enseigner l’anglais. Après cela, je suis allée en Belgique où j’ai travaillé quelques temps à l’école européenne. Lorsque je suis revenue ici, j’ai commencé à travailler dans la restauration et je suis retournée à l’université, à McGill. En 2013, mon ancienne maîtresse de stage, qui travaille toujours chez Business France, m’a rappelé pour me proposer un travail à temps partiel chez Business France. J’ai commencé fin 2013. Pendant plusieurs années, je suis restée à temps partiel car j’ai travaillé dans la restauration pendant longtemps, jusqu’à être directrice d’un restaurant. J’ai fait de la radio, j’ai travaillé dans l’immobilier… Comme souvent en Amérique du Nord, j’ai souvent fait plusieurs choses à la fois. En 2019, le directeur de zone de Business France m’a proposé de passer dans l’équipe V.I.E. [NDLR : Volontariat international en Entreprise], et j’ai accepté. Puis courant 2020, je suis devenue manageuse opérationnelle de l’équipe V.I.E en Amérique du Nord. Mon équipe se situe aussi bien à New York qu’à Chicago et le directeur du programme, Omar Janjua, se trouve à Toronto.
Quelle est la mission de Business France ?
M.B : Business France, c’est l’agence pour l’internationalisation de l’économie française. Sa première mission c’est d’aider les entreprises, les PME, les ETI, opérant en France à s’internationaliser (exporter, investir, etc.) à travers des missions de conseil, des études de marché, etc. La deuxième mission est née de la fusion entre Ubifrance et l’AFII (l’Agence française pour les investissements internationaux), lors de la création de Business France. Elle consiste à permettre aux investisseurs étrangers d’investir en France dans tous secteurs. La troisième mission de Business France concerne le V.I.E. Business France est mandaté en tant qu’opérateur d’Etat pour la gestion du programme. Ensuite, pour le visa au Canada, cela passe par le programme EIC (Expérience Internationale Canada) et le visa Jeune Professionnel. Le V.I.E en est une sous-catégorie, pour laquelle nous avons un quota de 500 places. Actuellement, plus de 7 000 jeunes sont en poste partout dans le monde, dont 640 au Canada. Le programme est ouvert notamment aux filiales française à l’étranger.
Quel est votre rôle au sein de l’entreprise justement ?
M.B : Concrètement, pour l’Amérique du Nord, mon équipe et moi nous occupons de gérer le programme à travers trois grands axes. Le premier concerne la validation des demandes d’affectation et la gestion des candidats tout au long de leur mission. Le deuxième est centré sur la promotion du programme, à travers l’organisation d’événements, de campagnes de communication ou de partenariats. Le troisième, est de faire de la prospection, en allant à la recherche de nouveaux clients ainsi que d’aller à la rencontre des clients existants.
Les entreprises françaises sont-elles intéressées et enthousiastes pour embaucher faire appel à des V.I.E ?
M.B : Les entreprises françaises sont très intéressées. Premièrement, parce que cela concerne des jeunes jusqu’à l’âge de 28 ans, qui ont déjà une certaine expérience de travail dans la majorité des cas. Cela leur permet de repérer des talents et souvent de les recruter par la suite. Quant aux jeunes cela leur permet d’avoir une expérience internationale habituellement difficile à obtenir aussi tôt dans leur carrière. Le programme est bien connu en France, mais ici au Canada et aux États-Unis, beaucoup d’entreprises connaissent peu, voire pas du tout le fonctionnement du V.I.E. Notre travail est donc d’informer le plus grand nombre sur ce beau programme.
Quels conseils donneriez-vous à une personne souhaitant s’installer au Canada, grâce à un V.I.E ?
M.B : Pour tout vous dire, les démarches sont assez simples. À partir du moment où le candidat est choisi, Business France l’accompagne dans toutes les étapes. Ensuite, en termes de destination, le Canada et les Etats-Unis sont assez prisés. Pour le Canada, le visa est attractif et le contrat V.I.E donne une certaine sécurité d’emploi. Pour les Etats-Unis les démarches d’obtention de visa sont raccourcies par rapport à la norme. Nous n’avons donc pas trop besoin de promouvoir ces destinations auprès des candidats. Nous travaillons cependant activement afin de développer le nombre d’offres dans les provinces de l’ouest, car au Canada, les deux tiers sont actuellement au Québec et un tiers du tiers restant à Toronto alors que le c’est un grand pays ! Du côté des Etats-Unis, la tendance se porte souvent vers les côtes, New York, Miami, San Francisco, Chicago sont parmi les destinations les plus populaires.
Qu’est-ce qui vous plait dans ce travail ?
M.B : J’aime le partage, c’est déjà ce que j’aimais lorsque j’étais professeure. Mais là je peux marier ce côté-là avec ma culture française qui fait aussi partie de mon identité. Je crois en ce programme. Je trouve que c’est une belle opportunité tant pour les jeunes que pour les entreprises et dans des conditions assez exceptionnelles. Au Canada, nous avons réussi à augmenter nos quotas de 450 places à 500, et nous voulons continuer dans cette voie. Aux Etats-Unis nous remontons rapidement la pente après les pertes subies pendant la pandémie. Après plus de 20 ans d’existence du programme, le défi de développement de cette formule au potentiel quasiment infini est ce que je trouve particulièrement motivant au quotidien.